Éprouvée par les dictatures militaires, l’Amérique latine des années 1970 voit naître en son sein un nouveau genre littéraire qui agit comme révélateur des exactions commises par les États : le polar latino.
Ses initiateurs trouvent dans le roman policier un moyen parfait pour révéler les racines profondes des crimes commis dans leurs pays. Peu à peu, ils se l’approprient puis le réinventent pour le faire correspondre à une réalité locale, différente du monde anglo-saxon. Dans leurs récits, souvent nourris d’éléments historiques, les détectives ne collaborent pas avec la police puisque celle-ci, souvent corrompue, n’inspire pas la confiance.
Depuis la fin des régimes dictatoriaux sud-américains, la novela negra, appréciée de nombreux lecteurs, évolue en roman social, dénonçant plus largement les maux qui rongent l’Amérique latine : inégalités socio-économiques, criminalité, abus de pouvoir, conséquences néfastes du néolibéralisme... L’intrigue policière sert désormais de fil rouge pour brosser le portrait de sociétés dont les États aimeraient occulter les problématiques.
Tour d’horizon
Ce voyage littéraire part à la rencontre de cinq romanciers acteurs de la refondation du genre policier sur le continent sud-américain : Paco Ignacio Taibo II à Mexico, Leonardo Padura à La Havane, Santiago Roncagliolo à Lima, Claudia Piñeiro à Buenos Aires, et Luis Sepúlveda, dont ce fut l’une des dernières interviews avant sa disparition en avril 2020, à Santiago.
Leurs interventions offrent différents points de vue sur l’histoire récente de l’Amérique latine et ses transformations, et éclairent le processus de création littéraire par lequel ils lient réel et fiction.