L'histoire en quelques lignes...
Dans la banlieue de Boston, Sean, Jimmy et Dave, trois gamins d’une dizaine d’années, jouent au base-ball dans la rue quand la balle tombe dans le caniveau. Échouant à la récupérer, ils entreprennent d’inscrire leur nom dans le béton du trottoir qui sèche. Deux hommes en voiture se prétendant de la police s’arrêtent alors pour les admonester, avant d’embarquer violemment Dave, tétanisé.
Il est séquestré et abusé pendant plusieurs jours avant de parvenir à s’échapper. Cet événement marque à jamais leur relation et leur vie.
Quelque trente ans plus tard, Katie, 19 ans, la fille chérie de Jimmy, est retrouvée sauvagement assassinée. Alors que son père, fou de douleur, cherche à faire justice lui-même, Sean, devenu inspecteur, est chargé de l’enquête.
Théâtre d’ombres
Deux "loups" qui enlèvent un petit garçon et dont on ne saura rien sinon leur prénom, ses copains qui regardent en silence la voiture s’éloigner vers les ténèbres de l’enfer : en adaptant le roman noir de Dennis Lehane, le maître Eastwood plonge le spectateur au cœur de l’indicible terreur de l’enfance.
Entre les sévices subis – et jamais montrés − par Dave, fantôme étranger à lui-même qui hante le film et dont Tim Robbins excelle à incarner l’enfermement dans un théâtre d’ombres, et l’innocence brutalement perdue de ses camarades marqués, eux, pour avoir échappé à l’horreur, le cinéaste remonte méthodiquement le cours de la rivière Mystic, qui irrigue la ville de Boston, vers l’origine du mal.
S’il brouille habilement les pistes de l’enquête sur le crime de l’adolescente – ex-victime, Dave apparaît vite comme le principal suspect −, il s’intéresse moins à son élucidation, inattendue, qu’à l’empreinte du trauma chez les trois héros, lesquels se sont éloignés en grandissant, dans un geste d’oubli. En chef charismatique d’une guerre intime, Sean Penn impressionne.
Maelström de douleurs enfouies, d’impossible(s) deuil(s) et de fautes irréversibles, Mystic River, avec sa lumière grise et poisseuse, se garde de juger des hommes condamnés à la fragilité.



































