La grande distribution cherche sans cesse à rogner sur les prix des fournisseurs, dont ceux des fruits et légumes. Si le fonctionnement du marché profite largement aux grands groupes, notamment aux géants de l’agroalimentaire, il paupérise une grande part des agriculteurs, qui manifestent aujourd’hui leur colère de l’Allemagne à l’Italie en passant par la France, pays où 20 % d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté.
Le constat a été largement dénoncé en début d’année 2024, mais ceux sur qui repose la survie du système, au prix d’une exploitation massive, restent la plupart du temps invisibles : des saisonniers, hommes et femmes, migrants sans papiers dans leur grande majorité. Employés le plus souvent illégalement, payés en dessous des minimums horaires et logés dans des habitats insalubres, ils louent leurs bras de récolte en récolte. L’agriculture européenne ne pourrait fonctionner sans eux.
En Allemagne, en Italie, en Espagne et en Grèce, une enquête éloquente se déploie sur leurs conditions de travail et de vie, parfois inhumaines.
Devoir de vigilance
"Les fraises ont un goût amer. À cause de la souffrance des femmes qui les récoltent. Et à cause des pesticides", lâche dans un souffle une cueilleuse marocaine. "Contrairement à ce que prétendent nombre d’entreprises, il ne s’agit pas de rares exceptions : notre système alimentaire repose sur l’exploitation d’êtres humains", résume Franziska Humbert, collaboratrice d’Oxfam.
Mais, selon certains députés européens, la nouvelle directive sur le devoir de vigilance des entreprises européennes en matière de droits humains et d’environnement, qui a fait l’objet d’un accord à Bruxelles en décembre 2023, constitue un "point de départ" pour mettre le secteur agroalimentaire et la grande distribution, entre autres, devant leurs responsabilités...