Dans la vie, il y a ceux qui savent et ceux… qui les écoutent. Ceux qui en savent plus que tout le monde, on les nomme les "experts". Pas forcément experts en tout, mais pour sûr experts dans leur domaine en particulier. Qu’ils soient spécialisés dans l’art, dans l’automobile, dans les pierres précieuses, dans les ventes aux enchères ou dans les assurances, ils interviennent parfois pour nous venir en aide, parfois pas du tout. Mais leurs décisions sont toujours capitales. Certains se forment seuls, mais beaucoup apprennent de leurs aînés.
Durant plusieurs mois, une équipe de "Grands Reportages" a suivi ces décideurs inflexibles en les accompagnant au bout de leurs enquêtes.
Épisode 2 • Tu seras un expert mon fils
Père et fils ne sont jamais loin. Marc et Julien travaillent ensemble, à bord de leur "expertibus". Les deux sillonnent les routes de l’Occitanie à la rencontre des Français pour dénicher les trésors de leurs greniers. Le fils, Julien, « aime voir des gens qui ne savent pas ce qu’ils ont chez eux ». À travers les routes de campagnes, il espère tomber sur de belles trouvailles, dont même les propriétaires n’imaginent pas le potentiel. C’est d’ailleurs ce qui vient de se passer. Chez une dame âgée, la statue posée depuis des lustres sur sa cheminée se révèle être de grande valeur. Pour Marc, c’est simple, « rien de plus ennuyeux quand on est commissaire-priseur que d’avoir quelqu’un qui sait déjà tout ». Travailler ensemble est une chose, mais Marc est-il prêt à transmettre tout son savoir-faire ? Julien peut-il reprendre les rênes de l’étude paternelle ?
Certains se forment seuls à force de redoubler d’efforts et de poser les yeux partout. Le parcours de Johann Naldi n’est pas celui d’un expert comme les autres. Il est plus atypique. Selon lui, il permet même « le rêve ». Car lui-même a cru en ses rêves. Initié à la peinture par le résident d’un Ephad, Johann s’est découvert un talent pour observer. Selon lui, « pas de génie là-dedans », juste un certain don pour « ouvrir les yeux ». Il découvre des trésors que n’ont pas vus ses concurrents, qui doutent de l’authenticité de ses découvertes tant ils ne se font pas à l’idée que la chance le choisisse si souvent. Au moment où nous le rencontrons, il veut vendre un tableau signé Gustave Courbet. Mais est-ce un vrai ou un faux ? Johann a fort à faire s’il veut convaincre de potentiels acheteurs et entendre sonner le marteau du commissaire-priseur. Le métier d’expert en art est-il une sorte d’entre-soi ? les nouveaux venus doivent être adoubés par la profession au risque d’être rejetés. Le parcours de Johann est semé d’embûches.
Autre rencontre, Philippe, qui exerce dans un tout autre domaine. Cet expert immobilier est celui qu’on appelle pour évaluer la valeur des biens, qu’il s’agisse des particuliers ou des commerces. Il adore son métier. Il a eu la révélation quand il était enfant : ses grands-parents travaillaient dans un hôtel et régulièrement un expert immobilier y venait pour faire le point sur la valeur de leur pension, il était celui qu’on écoutait. Aujourd’hui, lui aussi maitrise cet art particulier qui est, contre toute attente, celui de forger son expertise en faisant la conversation. Voilà sa botte secrète, communiquer et jouer avec son sourire ravageur pour déceler chaque détail important. Son péché mignon : « donner le ton ». Être celui qui dit oui ou non. C’est lui qui décide si oui ou non le montant des baux immobiliers qu’il examine est le bon.
Nous découvrirons enfin un expert qui a « le nez sous le capot ». Un genre d’expertise différente mais où le talent est tout aussi important. Johan tient ça de son père. Ou plutôt l’a appris de lui. Tous deux sont experts automobiles, on les appelle pour comprendre les circonstances d’un accident de la circulation, ses causes, et donc les responsabilités qui en découlent. Pour le fils Cornut, le parcours n’a pas été simple, tant les méthodes du père étaient rugueuses. Se construire une carte de visite professionnelle avec son propre prénom dans l’ombre d’un père reconnu comme un maître de son domaine, un expert avec un E majuscule, n’a pas toujours été simple. « Dans un jeu de sept familles, il y a le père, le fils … chacun a sa carte à jouer ». Aujourd’hui, les deux travaillent parfois main dans la main. Nous les suivons dans l’examen d’une voiture de prestige, ils doivent tenter de prouver qu’un défaut, un vice caché, a abusé l’acheteur.