Sur les 300 000 conducteurs de poids lourds que compte la France seulement 9000 seraient des femmes.
Des passionnées pour qui leur camion est à la fois le bureau et la maison pour la semaine. Missionnées pour des livraisons exceptionnelles ou pour approvisionner des magasins, les routières sont de plus en plus recherchées par les recruteurs. Et, la technologie évoluant, aujourd’hui plus besoin de gros bras pour tenir un volant !
"Grands Reportages" a suivi 4 audacieuses au caractère bien trempé, éprises de liberté et fières de trouver leur place dans un milieu encore très masculin.
A 19 ans, Clélia représente la nouvelle génération de routières. Elle est l’une des plus jeunes de France « Enfant, Obélix est tombé dans la marmite, moi je suis tombée dans un réservoir de gasoil ! ». Tout juste diplômée poids lourds, Clélia va intégrer l’entreprise dans laquelle travaille sa mère, routière elle aussi. Elle va surtout se former à une nouvelle compétence : la livraison en camion-citerne. Une formation dangereuse où la citerne est mise sous pression et peut exploser si les branchements ne sont pas faits correctement ! Une épreuve pour les nerfs de Clélia. Le soir, à la fin de ses longues journées de route, la jeune femme se sent souvent très seule « Là je n’ai qu’une envie : c’est que ma maman soit là ». Comment gèrera t’elle la pression imposée par la citerne et, alors qu’elle débute dans le métier, supportera-t-elle la vie rude des routiers, loin de sa famille ?
Marion, elle, ne vibre que « pour les trucs démesurés et compliqués ». Au début de sa carrière, elle transportait des piscines qu'elle installait à l'aide d'une grue... Aujourd’hui, à 36 ans, elle fait partie de l’élite des routiers, un petit milieu où les femmes sont encore plus rares : le transport exceptionnel. « Cela requiert une très bonne condition physique et morale. Mon truc c’est le toujours plus : plus long, plus lourd plus large. Et là alors je suis contente ! J’ai besoin de réfléchir, de me faire des nœuds au cerveau pour que mon convoi passe. » Un défi de taille l’attend : elle doit livrer pour la première fois un énorme engin de chantier en Corse. Elle n’en a jamais transporté d’aussi gros. Un trajet risqué où elle devra faire passer son convoi de 3m20 de large et 21 mètres de long dans les petites rues sinueuses des villages Corses de montagne… une mission qui se jouera parfois au millimètre près !
Aurore, elle, rêve de rejoindre la communauté des femmes de la route. Aide-soignante pendant 7 ans, celle qui affiche fièrement son look de pin-up a décidé à 32 ans de tout plaquer et d’entamer une reconversion pour conduire des poids-lourds. « Je n’ai pas réalisé tout de suite mon rêve, parce que j'ai suivi ce que mon père me disait. Pour lui, ce n’est pas un métier de femmes, ce n’est pas un métier pour moi. Là ça y est, je vais enfin faire le métier qui me plaît ! » Et ce qui plait plus que tout à Aurore ce sont les machines agricoles, les gros engins. Mais avant de pouvoir les conduire, elle devra s’entrainer sur un simulateur et réussir sa formation. « Ma plus grande crainte pendant cette formation est de me retrouver seule au milieu des hommes. » Réussira-t-elle à s’imposer et à décrocher le sésame vers sa nouvelle vie ?
Dans ce milieu, celles qui arrivent à concilier vie familiale et vie professionnelle sont rares. A 28 ans, Emilie fait partie de ces privilégiées. Routière de nuit, elle a mis en place avec son mari, conducteur poids-lourds lui aussi, un passage de relais pour pouvoir s’occuper à tour de rôle de leur fille de 3 ans. Une vie de famille atypique où la passion du camion tient une place centrale ! Le couple a investi près de 10 000 euros dans la décoration de son engin. Fière de son camion « immaculé, sobre et classe », Emilie a décidé de le présenter au plus grand concours de beauté de grosses machines de France : les 24H du Mans Camions ! Un show à l’américaine où des milliers de passionnés se retrouvent le temps d’un week-end. Son camion a été sélectionné mais, parmi 200 autres, sa sobriété séduira-t-elle le jury ? Son mari, lui, n’y croit pas du tout « Tu n’as aucune chance à coté de tous les autres ultras décorés et tape à l’œil, faut pas rêver ! »
Dans l’intimité de leur cabine, ces femmes nous dévoilent leur quotidien fait d’asphalte, de passion et solidarité avec pour horizon… la route !