Émile Louis, le chauffeur de bus, a échappé à la justice en 1984. L’enquête est repartie en 1997 mais Émile Louis se sent intouchable. Les meurtres des disparues de l’Yonne dont il est soupçonné remontent à environ 25 ans. A l’époque, le Code pénal prévoit qu’ils sont prescrits au bout de 10 ans.
Même lorsque, sur les indications d’Émile Louis, les enquêteurs déterrent les cadavres de deux disparues, en droit, le tueur en série ne peut plus être poursuivi.
Les différents acteurs de cette affaire nous expliquent comment la justice va réussir à se sortir de cette impasse, au terme d’une partie de bras de fer judiciaire historique.
Épisode 3 Piège pour un tueur en série
Le gendarme de la section de recherches de Paris Éric Barou, est le « tombeur » d’Émile Louis, celui qui l’a piégé « On n’était pas copains, mais presque. Je l’ai emmené tout doucement où je voulais aller. Je lui ai dit : « si la prescription est reconnue, on vous ramènera chez vous ». Donc je pense qu'il avait une certaine confiance en moi. »
Viviane Jousselin, la greffière du juge d’instruction Benoît Levandowsky, se souviendra toute sa vie du jour où le tueur en série a compris que le piège s’était refermé sur lui : « Monsieur Louis s'est rebiffé tout de suite en disant mais comment ? Mais non, mais moi je veux rentrer chez moi. Il n'y a aucune raison que je reste là. De toute façon, c'est prescrit. M. Louis a pris ce jour-là une bonne leçon de droit et il n'a pas dû l'oublier. »
Émile Louis a perdu la partie, il sera jugé, 30 ans après ses crimes, par la cour d’assises d’Auxerre, en novembre 2004.
Alain Thuault est l’un des avocats qui a la difficile tâche de le défendre : « Pour moi, ça a été un procès hors normes. Je n'avais jamais vécu ça. C'est difficile de faire admettre par le peuple français qu'on puisse défendre un coupable. On nous disait : vous devriez le faire avouer. Mais de quel droit ? »
Comme toutes les familles de victimes, Jean Pierre Weis le frère de Jacqueline, n’attend que cela :« Au moins qu'il parte avec honneur et qu'il dise aux familles des victimes : « Oui, c'est moi. »
Pour la première fois, Cathy Marlot, belle-sœur de Christine, l’une des disparues, va l’avoir face à elle : « Émile Louis était droit. Il n'a pas eu peur de nous regarder, nous on baissait les yeux. A un moment donné, je me suis dit moi aussi, je vais le regarder. C'était comme un défi quelque part. »
L’insupportable confrontation du tueur face aux familles durera trois semaines, jusqu’au verdict. Pour Jean Pierre Weis, « Une délivrance. On peut enfin reposer plus tranquillement, pas seulement moi, mais toutes ces jeunes filles ».